En 1912, on annonça en Angleterre la découverte à Piltdown du crâne d’un homme fossile. Il présentait une calotte crânienne très moderne mais était pourvu d’une mâchoire inférieure très simiesque. On venait enfin de découvrir le chaînon manquant entre le Pithécanthrope de Java et l’Homo sapiens, ce qui confirmait la théorie de l’évolution des espèces de Charles Darwin. De plus, l’Angleterre post-victorienne, pouvait s’enorgueillir d’être le berceau de cette nouvelle espèce si proche, par ses capacités crâniennes, donc intellectuelle, de l’homme moderne. En 1950, le site de Piltdown fut même déclaré monument national anglais. Bien que ce résultat ne fût dès l’origine pas admis par tout le monde scientifique, il fallut pourtant attendre 1953 et une des premières analyses au radiocarbone, pour que le faux puisse être certifié. Le crâne et la mandibule se révélèrent être postérieurs au Moyen-âge. Le faussaire, selon l’archéologue Miles Russell, aurait été le découvreur Charles Dawson.

Piltdown Man
Crâne complété de l’Homme de Piltdown (Image : BBC)

En ce jour du premier avril choisi pour l’annonce de fausses nouvelles qui seront démenties demain, on peut se demander comment les archéologues s’y prennent pour distinguer le vrai du faux. On peut s’en faire une petite idée sur le site de la Fondation Gottfried Matthaes de Milan qui vient d’être réactualisé, comme par hasard, aujourd’hui. Comme on le constate, grâce aux analyses typologiques, physiques et chimiques de plus en plus pointues, il est devenu difficile d’être faussaire. Si la supercherie de l’Homme de Piltdown ou Homo (Eoanthropus) Dawsoni a tenu plus de quarante ans, il serait sans doute difficile aujourd’hui de tromper le public aussi longtemps. Pourtant, malgré tout, il en est une autre qui plane peut-être près de chez moi. Les visiteurs du Laténium peuvent voir, vers la fin de leur parcours de l’exposition permanente, un maxillaire supérieur d’une femelle néanderthalienne trouvée en 1964 dans la grotte neuchâteloise de Cotencher. Lorsque je pense aux circonstances de cette découverte, presque unique en Suisse, j’ai un pressentiment. Non pas qu’il s’agit d’un faux maxillaire néandertalien, mais d’une pièce apportée dans la grotte et mise en scène par son découvreur comme dans le cas de l’Homme de Piltdown. Jusques à quand faudra t-il attendre avant qu’une analyse sérieuse ne soit menée sur l’origine exacte de ce fragment? Quousque tandem…ce n’est pas un poisson.